Projection + débat sur les problématiques de la valeur.

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Quelle est la valeur des biens et services que nous échangeons ? Nous avons des prix pour tout ! Mais les prix peuvent varier d’une société à une autre d’un individu à un autre.

Lors de cette projection + débat sur la valeur nous avons vu des extraits vidéos et débattu ensemble sur ces questions.

Voici les vidéos :

L’équipe du Festival De La Monnaie vous a proposé un tour d’horizon en vue de repartir du niveau le plus fondamental de la théorie de la valeur, ou plus exactement de la critique de la valeur, c’est-à-dire, au niveau des catégories de base de la société de production de marchandises : travail, valeur, marchandise et argent. Nous avons ensuite parlé du niveau auquel appartiennent ces catégories, puisqu’elles nous apparaissaient comme des faits et des contraintes objectivés, réifiés et fétichistes, prétendument « naturels ». À ce niveau, celui du prix, du profit, du salaire, de la circulation etc., les contradictions internes et le côté historiquement insoutenable de la société marchande moderne se manifestent ouvertement sous forme de crise. Cette esquisse nous aura permis de rendre compréhensibles les corrélations les plus importantes des processus de valorisation.

La critique de la valeur envisage le capitalisme comme une forme historique de fétichisme, le fétichisme de la marchandise. Le sujet du capital n’est plus identifié à la bourgeoisie ou au prolétariat, mais plutôt au processus de valorisation capitaliste lui-même que bourgeois et prolétaires entretiennent mutuellement, sans toutefois en tirer les mêmes avantages.

Dans ce cadre, les participants de cette projection débat ont identifié, comme une nécessité commune de critiquer le travail humain comme une catégorie historiquement déterminée, dont la part abstraite détermine la valeur, qui doit être distinguée de la richesse véritable et qui, devenant son propre but et imposant sa forme à la société toute entière, conduit à produire non pas ce qui est utile, mais ce qui est rentable. Quelques bonnes raisons de se libérer du travail auront alors émergé de nos discussions pour analyser le travail comme une catégorie typiquement capitaliste, quoique dérivée des anciennes formes d’esclavage, qui n’a pas pour but la satisfaction des besoins réels, mais devient sa propre fin, comme fondement de la valeur marchande, avec comme inéluctable conséquence, la crise écologique et l’abandon de l’activité concrète et utile.

Il est aussi apparu comme évident à l’esprit de nos débatteurs que l’anticapitalisme tronqué, qui impute la responsabilité de la crise à la « finance », au « crédit » opposés à « l’économie réelle », renouvelle la dangereuse pratique du bouc émissaire et dissimule le fait que la financiarisation de l’économie a permis la survie d’un captitalisme moribond. Ce prétendu anticapitalisme ne dépasse pas les catégories de la marchandise, de l’argent et de l’état, catégories à l’origine de la crise économique, écologique, énergétique et humaine, qui menace désormais l’existence de la plus grande partie de l’humanité devenue superflue à l’aune de la valorisation capitaliste. Il faut donc oser espérer le dépassement d’un monde agonisant, ultimement entretenu par la pratique du crédit à mort.

Après avoir rappelé l’ampleur de la financiarisation de l’économie, nous avons aussi convenu que la crise financière n’est qu’un symptome de la crise plus générale de la valorisation capitaliste, qui n’a d’autre choix, pour se perpétuer, que d’hypothéquer des profits à venir. Mais cette marchandisation d’un futur déjà consommé, exige la multiplication incessante de produits financiers détachés du réel. Malgré l’intervention de la puissance publique qui rachète ces titres toxiques en entretenant sa crédibilité au prix de désastreux programmes d’austérité, la dévalorisation du capital fictif est inéluctable. Au final, c’est avec le but « misérable de la valorisation de la valeur » que nous nous sommes engagés avec la certitude de devoir rompre avec cette logique : « Savoir si des logements seront construits, des hôpitaux entretenus, de la nourriture produite ou des lignes de chemin de fer maintenues ne peut pas dépendre du fait de savoir s’il y a assez d’argent. Le seul et unique critère doit être la satisfaction des besoins concrets. »

Yassine Berrada, chercheur au LLCP (Laboratoire des Logiques Contemporaines de la Philosophie) à l’université Paris VIII de Vincennes, Saint-Denis, est venu co-animer le débat avec Maxime Ghesquière, fondateur du FDLM, ce 12 Mai 2016.